CONTEXTE DU FORUM

J’ai bêtement imaginé qu’on ne subissait un truc pareil qu’en cas d’extrême nécessité. Quelque chose de douloureux, d’accablant ou d’invivable. Comme la mort, la maladie, l’humiliation et les regrets.
Mais j’ai eu tort. Humanité n’a jamais rimé avec prudence.

« Mr Habor,
Daphne Chowder a effacé Melvin Novoselic de sa mémoire. Veuillez s’il vous plait ne plus jamais mentionner leur relation passée devant elle.
Merci.

OBLIVION, INC. »

Combien de débiles s’étaient précipités chez eux pour réparer leurs putains d’erreurs. Combien d’entre eux avaient été exterminés comme je l’avais été des souvenirs de ceux qui comptaient pour eux. Je me demande où est passée l’honnêteté. Mais je l’ai juste là, l’honnêteté, sous les yeux. La vérité c’est qu’aujourd’hui on ne s’accroche plus à rien, ou pas assez fort. J’aurais été capable de sauver ce qu’il restait de nous, j’en suis persuadé, mais le conformisme a eu raison de celle que je croyais connaître. Daphne, tu mangeais tes frites avec les doigts et tu baillais sans mettre ta main devant la bouche. Où est-ce que t’es à présent ? Tu pourrais être à l’autre bout du monde, j’en aurais aucune idée. Tu es un mouton parmi les moutons et je m’apprête à te rejoindre, où que tu sois. J’ai l’impression que ce genre de lavage de cerveau est devenu aussi banal que l’institution du mariage et ce genre de réflexion me déprime. Mais je suis là, inconscient, couché dans mon pieu tandis qu’une machine me tourne autour de la tête. Tu m’as pas laissé le choix, au fond. Et je ne suis pas assez fort pour supporter l’imminence de nos retrouvailles défaillantes, craquelées.

Je n’ai jamais voulu de toi sous les traits d’une inconnue mais à présent il est trop tard. Nos meilleurs moments s’effacent et se mélangent aux pires tant ça n’a plus d’importance. On me vide de ton image. Dans quelques secondes tu ne seras plus nulle part et ton prénom ne me sera même pas vaguement familier. Je me demande depuis quand tu as tout ce courage, je t’ai surement toujours sous estimée. Une chose est sure, je ne suis pas aussi fort que toi. Je m’accroche à un dernier songe, j’y mets toute mon énergie, je résiste, mais celui-ci finit par s’égrener comme les précédents.

Au revoir, étrangère.